ワインやウィスキーに関する詩を通じて言葉の世界へ。

Les Vendanges - Aloysius Bertrand

収穫 – ポール・ヴェルレーヌ

Felipe Benitez Reyes

ワインの精 – シャルル・ボードレール

Bacchus - Andre Chénier
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Les Vendanges - Aloysius Bertrand
Quand le raisin est mûr, par un ciel clair et doux,
Dès l'aube, à mi-coteau, rit une foule étrange
C'est qu'alors dans la vigne, et non plus dans la grange,
Maîtres et serviteurs, joyeux, s'assemblent tous.
A votre huis, clos encor, je heurte.
Dormez-vous ?
Le matin vous éveille, élevant sa voix d'ange
Mon compère, chacun, en ce temps-ci, vendange.
Nous avons une vigne eh bien !
Vendangeons-nous ?
Mon livre est cette vigne, où, présent de l'automne,
La grappe d'or attend, pour couler dans la tonne,
Que le pressoir noueux crie enfin avec bruit.
J'invite mes voisins, convoqués sans trompettes,
A s'armer promptement de paniers, de serpettes.
Qu'ils tournent le feuillet sous le pampre est le fruit.
Aloysius Bertrand -
収穫 – ポール・ヴェルレーヌ
Les choses qui chantent dans la tête
Alors que la mémoire est absente,
Ecoutez, c’est notre sang qui chante…
O musique lointaine et discrète !
Ecoutez ! c’est notre sang qui pleure
Alors que notre âme s’est enfuie,
D’une voix jusqu’alors inouïe
Et qui va se taire tout à l’heure.
Frère du sang de la vigne rose,
Frère du vin de la veine noire,
O vin, ô sang, c’est l’apothéose !
Chantez, pleurez ! Chassez la mémoire
Et chassez l’âme, et jusqu’aux ténèbres
Magnétisez nos pauvres vertèbres,
Paul Verlaine -
Felipe Benitez Reyes
Dans cette transparence
Se cache un or blessé
Et de denses ténèbres
Demeurent latentes.
Quand elle éclate en bouche
Tel un sous-bois
Une lune liquide
Flâne dans les pensées
Et répands sa spectrale
Saveur de lumière
Au travers d'une topaze
Gouttant dans notre verre.
Felipe Benitez Reyes -
ワインの精 – シャルル・ボードレール
Un soir, l’âme du vin chantait dans les bouteilles :
« Homme, vers toi je pousse, ô cher déshérité,
Sous ma prison de verre et mes cires vermeilles,
Un chant plein de lumière et de fraternité !
Je sais combien il faut, sur la colline en flamme,
De peine, de sueur et de soleil cuisant
Pour engendrer ma vie et pour me donner l’âme ;
Mais je ne serai point ingrat ni malfaisant,
Car j’éprouve une joie immense quand je tombe
Dans le gosier d’un homme usé par ses travaux,
Et sa chaude poitrine est une douce tombe
Où je me plais bien mieux que dans mes froids caveaux.
Entends-tu retentir les refrains des dimanches
Et l’espoir qui gazouille en mon sein palpitant ?
Les coudes sur la table et retroussant tes manches,
Tu me glorifieras et tu seras content ;
J’allumerai les yeux de ta femme ravie ;
A ton fils je rendrai sa force et ses couleurs
Et serai pour ce frêle athlète de la vie
L’huile qui raffermit les muscles des lutteurs.
En toi je tomberai, végétale ambroisie,
Grain précieux jeté par l’éternel Semeur,
Pour que de notre amour naisse la poésie
Qui jaillira vers Dieu comme une rare fleur ! »
Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal, 1861 -
Bacchus - Andre Chénier
Viens, ô divin Bacchus, ô jeune Thyonée,
Ô Dionyse, Évan, Iacchus et Lénée ;
Viens, tel que tu parus aux déserts de Naxos,
Quand ta voix rassurait la fille de Minos.
Le superbe éléphant, en proie à ta victoire,
Avait de ses débris formé ton char d’ivoire.
De pampres, de raisins mollement enchaîné,
Le tigre aux lares flancs de taches sillonné,
Et le lynx étoilé, la panthère sauvage,
Promenaient avec toi ta cour sur ce rivage.
L’or reluisait partout aux axes de tes chars.
Les Ménades couraient en longs cheveux épars
Et chantaient Évius, Bacchus et Thyonée,
Et Dionyse, Évan, Iacchus et Lénée,
Et tout ce que pour toi la Grèce eut de beaux noms.
Et la voix des rochers répétait leurs chansons ;
Et le rauque tambour, les sonores cymbales,
Les hautbois tortueux, et les doubles crotales
Qu’agitaient en dansant sur ton bruyant chemin
Le faune, le satyre et le jeune sylvain,
Au hasard attroupés autour du vieux Silène,
Qui, sa coupe à la main, de la rive indienne,
Toujours ivre, toujours débile, chancelant,
Pas à pas cheminait sur son âne indolent.
(inachevé)
André Chénier, Poésies Antiques